Les médailles dont il est question doivent être celles conçues par Georg Christoph Wächter en 1769 et 1770. Il est intéressant de noter qu’il n’y a aucune mention dans la correspondance d’une date de naissance erronée sur la médaille antérieure (je suis toujours à la recherche d’un exemple de celle-ci). La deuxième version donne certainement la date préférée de Voltaire, le 20 février 1694. Cependant, Voltaire a écrit au moins sept lettres entre 1765 et 1768 pour déplorer un portrait imprimé qui donnait sa date de naissance au 20 novembre 1694. Le 20 février 1765, il écrit à son ami Damilaville : “J’entre aujourd’hui dans ma soixante-douzième année, car je suis né en 1694, le 20 février et non le 20 novembre, comme aiment à le dire les commentateurs mal informés”. Il écrit en termes similaires à son ancien secrétaire Collini le même jour et au duc de Richelieu une semaine plus tard. Il réitère cette affirmation à Damilaville le 10 mai : Il existe, dit-on, une gravure d’après le buste de Lemoine, qui me ressemblait assez il y a quelques années. On la trouve chez Joulin, quai de la Mégisserie ; il est vrai que l’impression ment un peu ; elle me fait naître le 20 novembre 1694 et je suis né le 20 février” ; et encore le 20 février 1767. Ce fut le tour du duc de La Vallière le lendemain et de D’Alembert le 23 mars 1768. Malheureusement, comme pour les médailles Wächter, je n’ai pas pu trouver une version de cette gravure donnant la date de naissance de Voltaire au 20 novembre 1694. Peut-être un aimable lecteur m’indiquera-t-il la bonne direction…
Le 1er janvier 1777, Voltaire pestait encore contre sa date de naissance officielle, cette fois à d’Argental : ” S’il était vrai d’après un maudit acte de baptême que je fusse né en 1694 au mois de novembre, il faudrait encore que vous m’accordiez que je suis dans ma quatre-vingt-troisième année “. Face à une telle profusion de dates, on pourrait faire pire que d’en choisir une toute autre pour célébrer Voltaire. Nick Treuherz a déjà écrit sur ce blog à propos d’un court poème écrit pour la fête de Voltaire, “la saint-François”, le 4 octobre 1767. La Correspondance littéraire a décrit les célébrations : poèmes, pièces de théâtre, feux d’artifice, dîner et bal au cours duquel le patriarche aurait dansé jusqu’à deux heures du matin.
– Alice
Ce billet est profondément redevable à la grande biographie Voltaire en son temps dans laquelle toute personne intéressée par ce sujet peut trouver des informations complémentaires.
Cette date de naissance est fréquemment acceptée sans questionnement. Voir par exemple l’article du blog de l’OUP sur ‘Les lettres d’amour de Voltaire’.
Voir ‘Interrogatoire du sr Harrouet fils prisonnier à la Bastille 21 mai 1717’, publié en annexe de l’édition de la correspondance de Voltaire par Théodore Besterman (D.app.5.III).
‘Dans la cour du palais, je naquis ton voisin’ (OCV, vol.70A, p.210).
Dans la Vie de Monsieur Jean-Baptiste Rousseau de 1738 : ‘Il y avait alors à Paris un café assez fameux, où s’assemblaient plusieurs amateurs des belles-lettres, des philosophes, des musiciens, des peintres, des poètes. M. de Fontenelle y venait quelquefois, M. de La Motte, M. Saurin, fameux géomètre, M. Danchet, poète assez méprisé, mais d’ailleurs homme de lettres et honnête homme, l’abbé Alazy, fils d’un fameux apothicaire, garçon fort savant, M. Boindin, procureur général des Trésoriers de France, M. de La Faye, capitaine aux gardes, de l’Académie des sciences; M. son frère, mort secrétaire du cabinet, homme délié et qui faisait de jolis vers, le sieur Roy, depuis chassé de l’Académie des inscriptions et du Châtelet, où il était conseiller, mais qui avait quelques talents pour les ballets, le sieur de Rochebrune, qui faisait des chansons; enfin plusieurs lettrés s’y rendaient tous les jours. Là, on examinait avec beaucoup de sévérité, et quelquefois avec des railleries fort amères, tous les ouvrages nouveaux. ¶On faisait des épigrammes, des chansons fort jolies. C’était une école d’esprit, dans laquelle il y avait un peu de licence’ (OCV, vol.18A, p.38-39).
‘Je crains bien qu’en cherchant de l’esprit et des traits, / Le bâtard de Rochebrune / Ne fatigue et n’importune / Le successeur d’Armand et les esprits bien faits’ (Voltaire to the duc de Richelieu, 8 June 1744). Curiously, Richelieu seems also to have thought himself illegitimate. See Voltaire’s letter to Mme de Fontaine of 8 January 1756, and his letters to Richelieu of 10 October and 3 December 1769.
Letters of 15 July 1753 and 11 August 1753. Twenty-five years later, at the end of his life, Voltaire was still describing dropsy as a family illness. See his letter to Théodore Trochin of 27 February 1778.
Letter from Jean Louis Dupan to Suzanne Catherine Freudenreich of 15 August 1756.
To be published in OCV, vol.78B.