DISCUSSION
Les accidents de la route sont la cause la plus fréquente de lésions cardiaques contondantes, suivis par les impacts de chutes violentes, les agressions interpersonnelles et divers types de sports à risque. Un coup direct à la poitrine, combiné au transfert direct d’énergie pendant l’impact, peut provoquer une décélération soudaine et puissante et une compression du cœur entre le sternum et la colonne vertébrale. La présentation clinique d’une contusion cardiaque est très variable, allant de l’absence de symptômes à des arythmies et une insuffisance cardiaque potentiellement mortelles. Le choc cardiogénique et le décès sont des manifestations rarement rencontrées.
Des anomalies électrocardiographiques apparaissent fréquemment en cas de contusion myocardique. Cependant, un électrocardiogramme normal ne permet pas à lui seul d’exclure le diagnostic. Une lésion du ventricule gauche peut produire des modifications du segment ST, ainsi que des anomalies de l’onde T ou de l’onde Q. Les lésions du ventricule droit peuvent provoquer un bloc de branche droit, bien qu’un tel bloc soit généralement transitoire. Différents degrés de bloc auriculo-ventriculaire ont également été décrits, bien qu’ils soient moins fréquents. Les arythmies ont tendance à se produire à la suite de schémas de perfusion anormaux, tandis que les anomalies de conduction peuvent être dues à des myocytes endommagés ou à des réflexes vagaux-sympathiques. Chez notre patient, l’existence d’un sus-décalage du segment ST dans les dérivations latérales, d’un bloc de branche droit et d’un bloc auriculo-ventriculaire complet peut indiquer une contusion myocardique plus importante et plus grave avec un risque plus élevé de nécrose myocardique, de formation d’anévrisme, de rupture et d’arythmie auriculaire ou ventriculaire fatale.
Le taux de créatine kinase (CK) est augmenté de manière non spécifique en cas de traumatisme cardiaque. Bien que la fraction CK-myoglobine soit connue pour avoir une meilleure spécificité chez les patients polytraumatisés, de nombreux faux positifs ont été rapportés. Les troponines cardiaques sériques sont hautement spécifiques des lésions myocardiques ; cependant, nous n’avons pas obtenu de taux de troponine dans ce cas car ils n’étaient pas disponibles au moment de l’admission.
L’échocardiographie permet de visualiser la fonction et le diamètre ventriculaires, les lésions valvulaires associées, les shunts ou thromboses intracardiaques, et l’épanchement ou la tamponnade péricardique. Les lésions valvulaires surviennent dans moins de 1 % des cas de traumatisme thoracique contondant et touchent principalement les valves aortique et mitrale. Les séries d’autopsies ont révélé des lésions des artères coronaires (par exemple, lacération, thrombose ou dissection) dans moins de 2 % des cas. Cependant, les lésions ischémiques typiques qui se présentent sous la forme de lésions sous-endocardiques à transmurales impliquant le territoire de distribution d’une artère coronaire, surtout lorsqu’elles sont associées à une concentration élevée de troponine et à des données échocardiographiques de dysfonctionnement ventriculaire, sont un indicateur clair d’infarctus du myocarde et doivent conduire à une coronarographie d’urgence. Dans notre cas, l’angiographie n’a pas été réalisée en raison du choc hémorragique du patient et de l’absence de laboratoire de cathétérisme cardiaque dans notre hôpital à l’époque.
Les lésions cardiaques graves avec nécrose myocardique guérissent par la formation de cicatrices, similaires aux cicatrices cardiaques observées dans l’infarctus du myocarde. Comme chez notre patient, la cicatrisation cardiaque peut entraîner la formation d’anévrismes ventriculaires et, dans certains cas, une insuffisance cardiaque chronique et des arythmies cardiaques. Ces patients doivent être soigneusement évalués afin d’établir le traitement nécessaire et d’éviter les complications à long terme. Un diagnostic précoce par une surveillance électrocardiographique continue, des électrocardiogrammes en série, le dosage sérique des marqueurs cardiaques, l’échocardiographie et l’angiographie permettront au clinicien de mieux évaluer le patient, améliorant ainsi sa survie.