Révolution des Pays-Bas (1568-1648). On dit traditionnellement que la révolte des Pays-Bas contre la domination espagnole, également connue sous le nom de guerre de Quatre-vingts ans, a commencé en juin 1568, lorsque les Espagnols ont exécuté les comtes Egmont et Horne à Bruxelles. Les tensions qui ont conduit à la révolte ouverte ont toutefois des origines beaucoup plus anciennes. La révolte elle-même doit être considérée comme une série de soulèvements et de guerres connexes qui, pris dans leur ensemble, constituent la révolte hollandaise. L’issue éventuelle de la révolte a été décidée en grande partie en 1609, lorsque les combattants se sont mis d’accord sur la trêve de douze ans, mais la guerre entre les Provinces-Unies des Pays-Bas (République néerlandaise) et le Royaume d’Espagne n’a officiellement pris fin que lorsque les deux parties ont accepté la paix de Münster, qui faisait partie de la paix de Westphalie, en 1648.
- Prélude à la révolte : la désunion des Pays-Bas
- LA PREMIÈRE RÉVOLTE (1566-1568) : LA PETITE NOBILITÉ ET LES TENSIONS RELIGIEUSES
- La SECONDE RÉVOLTE (1568-1576) : WILLIAM D’ORANGE ET LE DUC D’ALBA
- TROISIÈME RÉVOLTE (1576-1584) : LES PAYS-BAS UNIS ET DIVISÉS
- SURVIE : LES PAYS-BAS ESPAGNOLS ET LA TRUCE DE DOUZE ANS (1584-1609)
- ACCOMMODATION : LA DERNIÈRE GASPÉE DE LA GUERRE
- BIBLIOGRAPHIE
Prélude à la révolte : la désunion des Pays-Bas
Les différentes provinces des Pays-Bas (Low Countries) n’ont jamais été réellement unies en un pays distinct avant la fin du XVIe siècle. Elles ont été lentement et vaguement placées sous le contrôle des ducs de Bourgogne aux XIVe et XVe siècles, mais n’ont jamais été qu’un ensemble de comtés et de duchés. Ces territoires ont chacun conservé leurs lois et traditions coutumières, ce que l’on appelle les anciennes libertés. À bien des égards, cette désunion des provinces des Pays-Bas garantissait que les agendas particularistes feraient obstacle aux tentatives des souverains de créer une administration centralisée et un pays unifié.
Alors que les ducs bourguignons n’ont pas avancé trop vite dans le sens de l’expansion et de la centralisation, leurs successeurs habsbourgeois l’ont certainement fait. Le mouvement le plus important vers la centralisation avant la révolte a probablement été pris par l’empereur Charles V (gouverné de 1519 à 1556) lorsqu’il a réussi à faire unir ses “dix-sept provinces” des Pays-Bas en une seule entité par l’accord des États généraux (parlement) à sa Pragmatique Sanction en 1549. La Pragmatique Sanction définissait la manière dont la succession serait réglée et prévoyait que les dix-sept provinces devaient toujours avoir le même souverain. Il n’est pas clair, cependant, si cela signifiait que leurs libertés seraient compromises.
LA PREMIÈRE RÉVOLTE (1566-1568) : LA PETITE NOBILITÉ ET LES TENSIONS RELIGIEUSES
Le fils de Charles V, Philippe II d’Espagne (règne 1556-1598), poursuit la politique de son père, en particulier la suppression de l’hérésie, mais alors que Charles V, né à Gand, est une figure assez populaire, les Néerlandais considèrent toujours le Philippe d’origine espagnole comme un étranger. Les grands nobles des Pays-Bas et les délégués aux États généraux désapprouvent sa dépendance à l’égard des fonctionnaires envoyés d’Espagne. Bientôt, les nobles, dont Guillaume d’Orange (1533-1584), Lamoraal, comte d’Egmont (1522-1568), et le comte de Hoorne, Filips van Montmorency (1518-1568), sont désenchantés par le gouvernement de Philippe à Bruxelles, de plus en plus absolutiste et versatile, dirigé par l’impopulaire Antoine Perrenot (1517-1586), le futur cardinal Granvelle.
Le principal argument des nobles était d’ordre constitutionnel. Ils pensaient que le gouvernement devait être administré conjointement par le prince (généralement par l’intermédiaire de ses fonctionnaires), la noblesse et les États généraux. La noblesse avait donc un rôle important à jouer dans le gouvernement. En tant que principal fonctionnaire de Philippe aux Pays-Bas et champion de la prérogative royale, Perrenot subit de plein fouet l’ire de la noblesse. Mais plutôt que de chercher un quelconque compromis, le gouvernement de Philippe insiste pour que les nobles prêtent un serment d’allégeance (1567) au roi dans lequel ils renonceraient essentiellement à leurs libertés traditionnelles. Alors que de nombreux nobles acceptèrent ce changement (avec beaucoup de récriminations), Guillaume d’Orange et quelques autres refusèrent.
Ces questions constitutionnelles étaient soulevées à une époque de tensions religieuses croissantes, dues principalement aux réformes ecclésiastiques – Philippe II proposa d’instituer de nouveaux évêchés dans les Pays-Bas – et aussi à une augmentation des poursuites contre les “hérétiques”. Avec l’approbation du pape, le plan de Philippe prévoit la création de plusieurs nouveaux évêchés avec un primat des Pays-Bas en la personne de l’archevêque de Malines ; pour occuper ce poste, Perrenot est installé comme cardinal Granvelle. Mais c’est l’obsession des Habsbourg pour l’éradication de l’hérésie qui est souvent associée à l’insurrection de 1566. À la fin de l’année 1565, le Conseil d’État de Philippe ordonna aux fonctionnaires de l’Inquisition d’appliquer les lois anti-hérésie.
Pour la noblesse, c’était un affront de plus à son autorité. Les grands nobles envisagent de résister aux politiques religieuses du gouvernement, mais c’est la petite noblesse qui passe à l’action. Les petits nobles, menés principalement par des protestants ou des personnes ayant des penchants protestants, se réunissent à Culemborch pour former le Compromis de la noblesse, dans l’intention expresse de forcer la régente (et demi-sœur) de Philippe, Marguerite de Parme (1522-1586), à modifier la loi sur l’hérésie. En avril 1566, pas moins de quatre cents petits nobles, tous partisans du Compromis, se réunissent à Bruxelles pour présenter leur pétition à Marguerite. Un ministre désigna ces nobles non pas comme des pétitionnaires, mais comme les gueux, ” les mendiants “, un nom qui devint un badge d’honneur.
Les mendiants promirent la violence si Marguerite ne prenait pas de mesures contre les lois sur l’hérésie. Bien qu’elle ait publié un décret de ” modération “, le mal était fait ; les calvinistes avaient déjà commencé à bafouer les lois, et la prédication aux Pays-Bas avait atteint un point de fièvre à la fin du printemps 1566. Les nobles perdent rapidement le contrôle, les prédicateurs calvinistes incitant leurs auditeurs à détruire les nombreuses images religieuses présentes dans les églises des Pays-Bas. L’iconoclasme de l’été 1566 est généralisé, frappant Anvers le 20 août, puis Gand, Amsterdam, Leyde et Utrecht quelques jours plus tard. Marguerite, terrifiée, acquiesce aux demandes répétées des mendiants et accepte un “Accord” autorisant le culte protestant dans les régions des Pays-Bas où il est déjà pratiqué. Malheureusement, le Compromis de la noblesse s’effondre rapidement, ne laissant personne réellement maître de la situation. L’iconoclasme se poursuivit et Marguerite n’eut d’autre choix que de lever une armée pour ramener l’ordre dans les provinces.
Alors que Marguerite s’acharnait à mettre au pas les villes des provinces, Philippe II pesait ses options. En novembre 1566, il avait décidé d’envoyer une armée aux Pays-Bas. Mais les Mendiants avaient levé des troupes en opposition au gouvernement, si bien que Marguerite dut agir. Cela divise la noblesse, dont beaucoup se rangent du côté du gouvernement. Les troupes de Marguerite assiègent avec succès les bastions calvinistes et, le 13 mars 1567, elles battent les troupes rebelles à la bataille d’Oosterweel. En mai 1567, les Pays-Bas sont à nouveau sous le contrôle du régent. Le mois suivant, Philippe envoya son armée espagnole, sous la direction du duc d’Albe, aux Pays-Bas.
Une fois aux Pays-Bas, le duc d’Albe – Ferdinand Álvarez de Toledo (1508-1583) – entreprit d’éradiquer l’hérésie et, par le biais du Conseil des Troubles, de poursuivre les individus qualifiés de traîtres au roi d’Espagne. Sur les près de neuf mille personnes reconnues coupables d’avoir participé aux troubles de 1566-1567, dont certains nobles bien connus, au moins mille furent exécutées, notamment les comtes Egmont et Hoorne. Seuls les nobles restés fidèles à Philippe s’en sortent indemnes. Guillaume d’Orange apparaît comme le chef de facto de l’opposition. Sa tentative d’invasion des Pays-Bas depuis sa terre ancestrale d’Allemagne avec une force de quelque 30 000 hommes en octobre 1568 ne fait pas le poids face aux forces espagnoles. Le frère de Guillaume, le comte Louis de Nassau (1538-1574), fait des expéditions pour obtenir de l’aide des communautés calvinistes exilées en Angleterre, mais il est trop tard et les “Mendiants de la mer” (Watergeuzen) de Louis se tournent finalement vers la corsaire. À l’époque, William n’a d’autre choix que de battre en retraite. Il passa l’année suivante à se battre pour les Huguenots en France.
La SECONDE RÉVOLTE (1568-1576) : WILLIAM D’ORANGE ET LE DUC D’ALBA
En 1569, il semblait que la révolte aux Pays-Bas avait été étouffée et avait peu de chance de se rallumer. Alba entreprit d’instituer les plans et les politiques de Philippe pour les Pays-Bas, y compris les réformes ecclésiastiques. Guillaume d’Orange et ses partisans avaient continué à préparer une éventuelle invasion, mais, peut-être à cause de la dureté du régime d’Albe, il ne trouva que peu de personnes prêtes à se soulever aux Pays-Bas. L’aide devait venir de l’extérieur. La France est une source d’aide évidente, l’Angleterre en est une autre. Guillaume pensait avoir le soutien de ces deux pays. Ses plans d’invasion en 1572 prévoyaient une poussée de l’est avec son armée allemande et du sud avec une armée huguenote, ainsi qu’un assaut naval de l’Angleterre par les indisciplinés Mendiants de la mer. La coordination a échoué et les Mendiants de la mer, qui avaient été expulsés de leurs bases anglaises, ont agi trop tôt. Ils attaquent Brill (Den Briel) le 1er avril 1572, prenant la ville portuaire sans difficulté. À la fin du mois d’avril, Flushing est également aux mains des mendiants. Au cours des mois suivants, les Mendiants, généralement aidés par des transfuges dans les villes, parviennent à prendre Gouda (21 juin) et Dordrecht (25 juin). En juillet, Haarlem (15 juillet), Leyde (23 juillet) et Rotterdam (25 juillet) passent également du côté des rebelles.
La plupart des forces terrestres ne peuvent pas prendre le terrain avant juillet. Une armée rebelle sous Louis de Nassau réussit à prendre Mons (Bergen) et d’autres rebelles s’emparent de quelques autres villes, mais la force française du sud est sèchement défaite à Saint-Ghislain, et le changement d’attitude de la couronne française envers les huguenots signifie qu’aucune autre force ne sera envoyée. La propre force de Guillaume s’immobilise dans le nord-est. Alba réussit à reprendre les villes tenues par les rebelles, mais l’idée d’une guerre prolongée en Hollande et en Zélande, endroits où Guillaume avait de nombreux partisans, divisa les dirigeants espagnols, si bien qu’en novembre 1573 Philippe II remplaça Alba par Don Luis de Requesens y Zúñiga (1528-1576).
William d’Orange ne perdit pas de temps pour profiter de l’indécision espagnole en étrillant le soutien des États de Hollande et de Zélande. Alors que toute la Hollande et la Zélande ne pouvaient pas accepter la position de Guillaume (Amsterdam restait fidèle à Philippe), les deux provinces s’unirent au cours de l’été 1575 avec Guillaume d’Orange comme chef. Entre-temps, Requesens avait suivi les conseils d’Alba et avait pénétré en Hollande et en Zélande. Les Espagnols réussissent à capturer des villes rebelles comme Haarlem et Brill en 1573. Les rebelles n’ont pu résister qu’en inondant de vastes zones avant l’armée espagnole. Les inondations ont tenu les Espagnols à distance, déjouant leur siège de Leyde en 1574.
Les coûts de cette guerre prolongée aux Pays-Bas étaient astronomiques. On a estimé que la guerre a coûté à l’Espagne plus que les revenus combinés de la Castille et des possessions espagnoles du Nouveau Monde. En raison du manque de solde, l’armée espagnole se mutina à plusieurs reprises, abandonnant ses garnisons et les laissant ouvertes aux forces rebelles. Philippe est au bord de la faillite. Il ordonne à Requesens d’ouvrir des négociations avec les rebelles. Requesens rencontre Guillaume à Breda en mars 1575. Les pourparlers se soldent toutefois par un échec, car aucune des parties ne veut céder sur la question religieuse. Dans l’année, la crise financière était devenue aiguë, Requesens était mort, et malgré une victoire espagnole sur Zierikzee en Zélande, les Espagnols ne pouvaient pas payer leurs salaires et les troupes se mutinèrent une fois de plus.
TROISIÈME RÉVOLTE (1576-1584) : LES PAYS-BAS UNIS ET DIVISÉS
Les mutineries des troupes espagnoles de 1576, plus que toute autre chose, ont rassemblé les différentes provinces des Pays-Bas dans une cause commune. Lorsque les troupes mutinées mettent à sac la ville royaliste d’Alost, même les catholiques fidèles à Philippe cherchent une sorte d’arrangement défensif commun. Les pourparlers entre les partisans de Guillaume et les loyalistes catholiques débutent à Gand en octobre 1576. Les participants à la réunion de Gand acceptent de mettre de côté leurs propres différences religieuses en suspendant les lois sur l’hérésie et en s’unissant pour expulser les Espagnols. Cet accord, appelé “Pacification de Gand”, a été rapidement ratifié par les différents États provinciaux en réaction à la “Furie espagnole”, la violente mutinerie des troupes espagnoles à Anvers le 4 novembre 1576, qui a fait environ huit mille morts. La Pacification de Gand ne résout cependant pas le problème de la désunion des Pays-Bas. Ce qui semblait être une unité d’action n’était que temporaire.
Philippe nomme son demi-frère, Don Juan d’Autriche (1547-1578), pour remplacer Requesens comme gouverneur général des Pays-Bas. Sa charge était de trouver un accord temporaire avec les rebelles. En effet, les États généraux sont heureux de le reconnaître comme gouverneur, à condition qu’il accepte les dispositions de la Pacification de Gand. Guillaume d’Orange reste méfiant à l’égard de Don Juan et incite les Etats Généraux à agir avec prudence. Les États généraux installent Don Juan comme gouverneur général le 1er mai 1577, malgré les objections de Guillaume. Guillaume a raison de s’inquiéter des intentions de Don Juan. Don Juan tente de neutraliser les États généraux et d’imposer sa propre autorité dès juillet 1577, lorsqu’il s’empare de Namur, attaque sans succès Anvers et rappelle les troupes espagnoles aux Pays-Bas. En raison de cette duplicité, les nobles catholiques du sud des Pays-Bas s’arrangèrent pour que l’archiduc autrichien Matthias (1557-1619) remplace Don Juan comme gouverneur général, mais cet arrangement ne fut jamais reconnu par Philippe II.
Pendant tout cela, Philippe II avait été préoccupé par la menace de l’Empire ottoman à l’est. Une fois la paix avec les Turcs obtenue après la bataille de Lépante en 1571, Philippe réagit de manière décisive aux développements aux Pays-Bas. Il renvoie son armée espagnole dans les Pays-Bas sous la direction d’Alexandre Farnèse (1555-1592), prince et futur duc de Parme. Dès que Parme et son armée débarquent, ils entament une campagne fructueuse, prenant Gembloux le 31 janvier 1578 et Louvain le 13 février. Don Juan meurt de la peste en octobre, et Philippe nomme Parme gouverneur des Pays-Bas.
Malgré l’aide militaire de la France et de l’Angleterre, les luttes intestines entre les provinces empêchent toute possibilité d’action unie. La division entre les provinces catholiques du sud, largement royalistes, et les provinces calvinistes du nord, indépendantes, déchire les États généraux. En janvier 1579, les provinces du nord (Hollande, Zélande, Utrecht, Frise, Gueldre et Ommelanden) concluent l’Union d’Utrecht, créant ainsi les Provinces-Unies. Les provinces méridionales du Hainaut et de l’Artois créent l’Union d’Arras (rejointe plus tard par la Flandre wallonne), qui se réconcilie avec le règne de Philippe II le 6 avril 1579. Les provinces de l’Union d’Arras, ainsi que les provinces déjà sous contrôle espagnol (Namur, Limbourg et Luxembourg), constituaient la base du maintien de la domination espagnole.
Continuant leur démarche vers l’indépendance, les provinces de l’Union d’Utrecht déposèrent Philippe II comme souverain des Pays-Bas dans l’acte d’abjuration (26 juillet 1581). La question de savoir qui devait le remplacer devint le problème que les États généraux devaient résoudre. Ils se tournent finalement vers François de Valois (1556-1584), duc d’Anjou, un prince français du sang et un catholique. Il n’a jamais été particulièrement populaire et n’a jamais reçu les dignités qu’il attendait, si bien qu’il est rentré en France à l’été 1583. Lorsqu’un royaliste assassina Guillaume d’Orange à Delft le 10 juillet 1584, les Provinces-Unies se retrouvèrent sans chef fort.
SURVIE : LES PAYS-BAS ESPAGNOLS ET LA TRUCE DE DOUZE ANS (1584-1609)
Avec Guillaume d’Orange hors jeu, Parme commença sa campagne de reconquête des Pays-Bas. Gand se rend à l’armée de Parme le 17 septembre 1584 et Bruxelles capitule le 10 mars 1585. La recherche d’une aide étrangère face à ce qui s’apparente à une reconquête espagnole amène le regard des États généraux à se porter à nouveau sur l’Angleterre. Un accord, formalisé par le traité de Nonsuch le 20 août 1585, est conclu entre les Anglais et les États généraux, permettant à Élisabeth Ire de nommer un gouverneur général pour les Pays-Bas et d’envoyer une importante armée pour stopper l’avancée espagnole. Mais Anvers – le plus grand prix de Parme – était déjà tombé aux mains des Espagnols le 17 août.
Élisabeth Ier nomma Robert Dudley, le comte de Leicester (1532/33-1588), comme gouverneur général, mais elle ne put éliminer la désunion qui affligeait les Pays-Bas, et les tentatives de Leicester d’imposer ses propres idées de gouvernement centralisé furent vouées à l’échec. Finalement, Leicester n’a d’autre choix que de retourner en Angleterre avec son armée. Les Hollandais se tournent alors vers l’un des leurs pour mener la révolte : Le comte Maurice de Nassau (1567-1625), le deuxième fils de Guillaume d’Orange.
Pour Philippe II, l’implication des Anglais dans la révolte ne pouvait être considérée que comme un acte de guerre. Afin de contrer les Anglais, et en partie en réaction à la “piraterie” anglaise contre le commerce espagnol avec le Nouveau Monde, Philippe envoya une armada de plus de 100 navires pour envahir l’Angleterre en 1588. Le sort de l’Armada espagnole est bien connu, mais cette défaite navale n’a pas entravé les capacités espagnoles sur terre. Néanmoins, l’attention portée par les Espagnols au problème anglais et leur implication dans les guerres françaises donnèrent un peu de répit aux Hollandais. Maurice réussit à reprendre de nombreuses villes du nord perdues au profit de l’Espagne au moment même où Philippe II ordonna à l’armée de Parme d’intervenir dans la guerre civile en France, où Parme mourut en 1592.
Maintenant, les Espagnols se retrouvaient sans chef aux Pays-Bas. Finalement, Philippe II nomma son neveu (et futur gendre) l’archiduc Albert d’Autriche comme gouverneur général en 1596. Albert n’a cependant pas réussi à consolider le pouvoir espagnol aux Pays-Bas, en raison de la faillite de l’Espagne, des mutineries des troupes et des désertions. Les années suivantes sont marquées par une période de guerre intense qui se solde par une impasse. Philippe II était alors mort et son successeur Philippe III (qui régna de 1598 à 1621) ne voyait pas comment continuer à financer une guerre qui drainait le trésor espagnol depuis des décennies. Le temps était venu pour le processus de paix suggéré par Henri IV de France (régnant 1589-1610) : les deux parties acceptèrent une trêve de douze ans à Anvers le 9 avril 1609.
ACCOMMODATION : LA DERNIÈRE GASPÉE DE LA GUERRE
La trêve de douze ans fonctionnait plus à l’avantage des Hollandais qu’à celui des Espagnols. Les Hollandais, libérés de la nécessité de mener une guerre coûteuse avec l’Espagne, ont pu construire une économie puissante. Sur le plan politique, cependant, la forme que prendra finalement la République néerlandaise fait encore l’objet de nombreux débats, en particulier le rôle que jouera l’Église réformée (calviniste). À la fin de la trêve, les Pays-Bas espagnols sont en perte de vitesse. Le commerce de l’Espagne se heurte à la forte concurrence des Hollandais, et les Hollandais et les Espagnols se trouvent attirés par les différents aspects de l’évolution politique de l’Europe du début du XVIIe siècle. La Révolte hollandaise s’était fondue dans le grand conflit européen de la Guerre de Trente Ans (1618-1648).
Lorsque la Trêve de Douze Ans expira finalement en 1621, Philippe III était mort, et les factions pro-guerre des deux côtés appelaient à la reprise des hostilités. Mais à ce moment-là, aucun des deux camps ne s’attendait à triompher de l’autre. Les deux parties étaient impliquées dans la guerre de Trente Ans, et les Espagnols en particulier ne pouvaient pas consacrer beaucoup d’attention à la guerre aux Pays-Bas. Le meilleur plan d’action était de demander la paix. Les négociations durent plusieurs années, les deux belligérants ne faisant que lentement des concessions. Finalement, le 30 janvier 1648, la paix de Münster (intégrée ensuite à la paix de Westphalie d’octobre 1648) mit fin à la guerre entre l’Espagne et les Provinces-Unies, rendant permanente la division des Pays-Bas et garantissant l’indépendance de la République néerlandaise.
Voir aussi Alba, Fernando Álvarez de Toledo, duc de ; Charles Quint (Saint Empire romain germanique) ; République néerlandaise ; Isabel Clara Eugenia et Albert de Habsbourg ; Juan de Austria, Don ; Pays-Bas, Sud ; Oldenbarneveldt, Johan van ; Parme, Alexandre Farnèse, duc de ; Philippe II (Espagne) ; Guerre de Trente Ans (1618-1648) ; Westphalie, paix de (1648) ; Guillaume d’Orange .
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